top of page


   Black(s) to the Future est un collectif de recherche
expérimental et artistique, initié en 2015 par Mawena 
Yehouessi (aka M.Y). Réunissant des artistes / musiciens /
écrivains / activistes / chercheurs aux influences 
syncrétiques, hybrides : B(S)TTF est à la fois médium et
média. Son site blackstothefuture.com, son antenne radio sur 
R22 Tout-Monde ou encore son festival (@ Petit Bain, Paris)
sont autant d’espaces de réflexion créative alliant 
exploration, singularité(s) et prospective. Nourri
d’afrofuturisme, à la fois comme esthétique mais également 
philosophie et mode de transformation possibles du monde,
Black(s) to the Future évolue au gré des envies et des 
opportunités. Laissant grande place à l’intuition, nous
imaginons donc des formats, dispositifs et situations comme 
autant de manifestations des liens qui se tissent d’une
constellations d’affects.


Membres de Black(s) to the Future:  Vincent Bremaud, Sybil 
Coovi Handemagnon, Fallon Mayanja, Josèfa Ntjam, Ingha 
Mago, Nicolas Pirus, Kengné Teguia, Eden Tinto Collins, Ayélé
Sant’Anna, Eliot Trovero, Mawena Yehouessi.

​

​

COOVI  HANDEMAGNON Sybil 
Archives, 2013
Série de 9 photomontages et cartels, collection de l’artiste. 

 «  J’avais la sensation d’être une archive, mais je suis une
archive impossible. »   Sybil Coovi Handemagnon

 


   Entre archives photographiques et décor reconstitué,
l’œuvre de Sybil Coovi Handemagnon instaure une confusion
entre le réel et la fiction. Sélectionnées au sein de la
collection anthropologique du Prince Roland Bonaparte, ces
cinq tirages ont été retravaillés par l’artiste. Les clichés
d’origine renvoient à l’histoire des expositions coloniales 
organisées au XIXe siècle, des attractions populaires exposant
la culture des territoires colonisés. Des villages indigènes
étaient reconstitués dans lesquels étaient exhibés des
autochtones, à la manière de véritables zoos humains. En
usant du photomontage, Sybil Coovi Handemagnon se
distancie de cette histoire en créant un effet de surprise par
l’effacement des corps colonisés sur les clichés originaux.
Cette stratégie renforce paradoxalement la présence fantomatique des disparus, et souligne la violence d’un
dispositif colonial déshumanisant. En s’émancipant du
pouvoir de l’archive, en contestant son autorité, l’artiste
montre que celle-ci ne concerne pas le passé mais bien
l’avenir : il s’agit de se réapproprier une mémoire
douloureuse, de décoloniser l’archive pour proposer des
perspectives de reconstruction.
   Née en 1988, Sybil Coovi Handemagnon est membre du
collectif Black(s) to the Future. Elle a obtenu son DNSEP à
l’École Nationale Supérieure d’Art de Bourges en 2015. Entre
réappropriation critique des archives et installations, ses
œuvres interrogent les systèmes de présentation muséaux
ou institutionnels, la mémoire collective du passé colonial
et ses répercussions sur les représentations et les identités.

​

LAKHRISSI Tarek
Diaspora/situations, 2017
Vidéo, 46 minutes.
Collection de l’artiste


Tarek Lakhrissi, Diaspora/situations, 2017 ©T. Lakhriss


 Diaspora/situations  est un web-documentaire composé
d’une dizaine de portraits d’activistes et d’artistes de
couleur et queer, basé·e·s entre Montréal, Bruxelles,
Londres, Paris et Nantes. Membres de la diaspora, une
communauté déterritorialisée et dispersée à travers le
monde, ces personnes minorisées évoquent leur rapport au
corps, aux émotions, la question des origines et de
’identification. Elles retracent leurs parcours artistiques,
personnels et politiques, en proposant une multiplicité
kaléidoscopique de points de vue sur le monde. Venus de la
marge, ces récits viennent questionner les normes et les
stigmatisations sociales en soulignant la force critique de
’expérience intime. À la suite d’Édouard Glissant, ils
dévoilent une « personnalité instable, mouvante, créatrice, 
fragile, au carrefour de soi et des autres ».
 Tarek Lakhrissi est un artiste, poète et écrivain français
d’origine algérienne né en 1992. Installé à Paris, il est
diplômé en études théâtrales de l’Université la Sorbonne
Nouvelle. Il a également suivi des études d’histoire de l’art
et de cinéma à l’Université de Montréal. À la fois théorique,
visuelle et poétique, sa création s’approprie différents
angages - l’écriture, la vidéo, la performance ou encore la
ecture poétique – pour explorer les rapports entre les
héories postcoloniales, la culture populaire et la notion
d’arabité, ainsi que les espaces affectifs et politiques
comme outils de résistance.

 



M.Y. aka YEHOUESSI Mawena 
Extrapolation series (2018)
4 gifs sur tablettes distinctes
Collection de l’artiste.
Mawena Yehouessi, Extrapolation series (2018) ©M. Yehouessii

 


 Disposés sur quatre tablettes, des .gifs clignotent sans quenous ayons le temps de bien discerner leurs contenus. Cen’est qu’au bout d’un temps d'adaptation,d’accommodation, d’apprivoisement que nouscommençons à distinguer des bribes de mots, d’images.
Nous essayons alors d’extrapoler pour repenser l’Histoire. 
 «Le drap peau a changé», «Noire colombe, moutonblanc», «Mon noir est parti en cendres  », «Black, Jaune,
Beur·e »: tenant du meme, du slogan ou de la devise, cesphrases intrigantes ont émergé de l’émulation collective ausein de Black(s) to the Future, où naissent des «narrationsafro-connexes & prospectifs». Sur le modèle de la formulepublicitaire, usant de l’esthétique du glitch, cet art du bug
ou de l’erreur numérique, il s’agissait de reprendre les codesde communication mass-médiatique. À la suite d’unworkshop de travail autour de l’exposition Futuribles, menéavec les étudiant·e·s élaborant le projet, M.Y. s’aperçoittoutefois du risque de relativisation de ses .gifs: «cesimages risquaient d’être reçues, de fait, “ex nihilisme”
comme d’énièmes devises publicitaires, inutiles voire
contraires à ma démonstration». Perturbant l’apathie de lamasse, l’artiste décide alors de confronter les .gifs et leursénoncés aux publicités de l’époque coloniale, dont lesreprésentations racistes et impérialistes ont façonnél’inconscient collectif. Entre confrontation et mise entension, la série Extrapolation  dénonce l’uniformisation
color-blind, ces discours qui nient les inégalités et les
distinctions basées sur la couleur de peau. Renouant avec
l’Histoire, l’œuvre retrace la généalogie des images et des discours pour en travailler les potentialités politiques.

​

 Née au Bénin en 1990 et installée à Paris, Mawena
Yehouessi  (M.Y.) se définit de manière multiple. Elle est
directrice de projet culturels et artiste, fondatrice de la
plateforme transmédia afrofuturiste Black(s) to the
Future. Chercheuse en philosophie esthétique, elle débute
également une thèse en philosophie intitulée 
Afrofuturisme et trans-mondanité : pour une
phénoménologie de l’altérité. Enfin, dans la peau de son 
persona, M.Y., elle développe une pratique artistique
syncrétique, entre collage, art numérique et performance.

​

​

NTJAM  Josèfa 


Hilolombi (2013)
Vidéo noir et blanc, sonore, 4'
Collection de l'artiste
Hilolombi (2013), Vidéo noir et blanc, sonore, 4', Collection de l'artiste


 Un fond noir. Un visage. Le visage de l'artiste, qui tourne
à la manière d’un disque vinyle. En fond sonore, un récit
fictionnel d'anticipation écrit et lu par Josèfa Njam. 
Hilolombi dépeint une utopie politique. En 2050, le
continent africain est devenu «les États-unis d'Afrique»,
tel que l’avait proposé l'écrivain jamaïcain Marcus Garvey
en 1924, à la source du mouvement politique
panafricaniste. Un collectif d’ingénieurs néerlandais et
africains envisage des voyages spatiaux propulsant
l’Afrique dans le futur.  La fiction futuriste relie ces
perspectives aérospatiales à un retour aux pratiques
animistes traditionnelles et propose un syncrétisme entre
les mythologies de l’Égypte antique et la cosmogonie du
peuple Bassa (Cameroun). La nouvelle société voue un
culte à Hilolombi, dieu créateur, dieu du soleil, ancêtre
primordial des bassa. Juxtaposé à ce récit, le visage qui
tournoie à l’image est noirci, en référence aux minstrel 
shows, spectacles racistes très populaires au XIXe siècle 
aux États-Unis, dans lesquels les noirs étaient caricaturés
et infériorisés, notamment par la pratique du black face,
consistant à se noircir le visage.

Pour guérir ces traumatismes, pour «évoluer vers un
futur puisé dans le passé, autre que celui de la
persécution», la vidéo propose des voies d’émancipation
pour les noirs. Il s’agit de «restaurer les réponses et la
paix en chacun de nous jusqu'à ce que l'idéal d'une
fraternité humaine incluant le peuple noir soit devenu
une possibilité pratique». À travers la science-fiction et
l'Afrofuturisme, l'artiste déconstruit les récits
colonialistes qui ont minimisé l'importance de l'histoire
et de la culture africaines. Par la fiction spéculative, il
s’agit de faire émerger des récits oubliés ou censurés, de
réécrire une histoire, d’envisager des potentialités
futures.
  Josèfa Ntjam est une jeune artiste française née en 1992,
appartenant au collectif Black(s) To The Future. Diplômée
d'un DNSEP à l’École Nationale Supérieure d'Art de ParisCergy

(ENSAPC) en 2017,  elle a également un DNAP de
l’École Nationale Supérieure d'Art (ENSA) de Bourges,
obtenu en 2015. Josèfa Ntjam a autant recours à la vidéo,
à l'écriture, à l'installation qu'à la performance. Ces
médiums lui permettent d'explorer l'Histoire, et la façon
dont elle peut influencer notre imaginaire. À travers
l'exploration des mythes et autres récits, l'artiste en
expose des facettes originales et inconnues, grâce
notamment, au récit utopique.

​

​

NTJAM  Josèfa 


Plantes en révolte (2018)
Performance présentée le 4 mai 2018 à 19h30, à l’occasion 
du vernissage de l’exposition. Durée variable.
Plantes en révolte (2018) Performance présentée le 4 mai 2018 à 19h30, à l’occasion du vernissage de l’exposition. Durée variable.


  «Une fiction spéculative qui mes racines portent en ellesdes milliers de parchemins, comptant ces histoires derévoltes, on me brûla, invoquant mes pouvoirs mystiques»,
Lichaune.


  Muni d'un sachet contenant des graines et une carte àjouer sur laquelle est représentée une plante sur fond decouleur vive; le spectateur est invité à entrer dans unepièce. Une pièce sombre. Des lueurs: rougeâtres, vertes. Desplantes. Et l'artiste, qui assise, attend patiemment lespectateur dans cette pépinière utopique. Cette mise enscène intimiste évoque un espace des possibles. Ellepourrait se rapporter au vaisseau de Sun Ra, qui avait pour
but d'éloigner la population afro-américaine de la Terre, ceterritoire de persécution des minorités; pour les amener
vers un endroit où tout est possible, Saturne. Unrapprochement peut être fait entre Saturne et la planèteprésente sur un écran lors de la performance de JosèfaNtjam, qui représenterait, elle aussi un espace à construire.
  Les plantes, aux noms et aux vertus plus intrigantes lesunes que les autres, forment un herbier fictif. L’artiste nousdonne les clefs pour comprendre ces végétaux en narrantleur histoire poétique par des vers mêlant imagesphotographique, douceurs et déchaînements verbaux. Atravers cette métaphore végétale, ce sont les luttes,notamment anti-colonialistes, ou contre une quelconque
forme de domination, auxquelles  les peuples minoritairesont dû faire face tout au long de l'Histoire, qui nous sontracontées.
  Cette narration fictive et poétique met les plantes au premier plan, ces mêmes plantes qui dans certaines civilisations, notamment au Cameroun, ont des vertus, des pouvoirs. Encore aujourd'hui, la connaissance de ces végétaux est un patrimoine perpétué par ces populations.

​

​

​

Black(s) to the Future

GORDON Douglas


Star Trek, predictable incident in unfamiliar surroundings 
(1995).Vidéo, couleur, non sonore, durée 23’, Collection 49
Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz.
Douglas Gordon, Star Trek, predictable incident in unfamiliar surroundings, 1995, Collection 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz © D. Gordon


  Dans la vidéo Star Trek, predictable incident in unfamiliar
surroundings (Star Trek, Incident prévisible dans un
contexte peu habituel), Douglas Gordon se réapproprie des
séquences cultes de la série télévisée américaine qu’il isole
et manipule  : les extraits sont re-filmés, ralentis, agrandis
et montés en boucle en coupant le son. L’artiste compile les
rares scènes de baisers entre héros masculin de Star Trek, le
Capitaine Kirk et ses conquêtes féminines. Il joue ainsi sur
les codes de la représentation du baiser, ce stéréotype de
l’industrie audiovisuelle. Le montage met en exergue la
virilité agressive du héros face à des femmes séduites et
soumises. Renvoyant à un univers fantasmatique masculin,
ces manipulations obsessionnelles soulignent la violence et
la domination sous-jacente exercées sur des personnages
féminins hypersexualisés. Ainsi, Gordon propose une
réflexion sur le pouvoir et la culture des images, accentuée
par le dispositif de projection  : un vidéoprojecteur, de
qualité moyenne, installé sur des caisses de bières. Cette
mise en espace renvoie à la culture populaire et à la
pratique du «  home cinema  », qui transforme une
pratique publique (aller au cinéma) en pratique privée. 
  Douglas Gordon est un artiste écossais né en 1966 formé à
la Slade School of Art et à la Glasgow School of Art puis à la
Slade School of Fine Art de Londres. Il présente sa première
exposition en 1986 et reçoit le Turner Prize en 1996.
Multiple, son œuvre mêle vidéos, photographies,
installations, performances. Pratiquant le détournement et
la réappropriation d’images diverses qu’il décontextualise
et manipule. Entre critique médiatique et citations
cinématographiques, il travaille sur la surprise et la
mémoire collective.

​

​

LABORIA CUBONIKS 


Xénoféminisme  : une politique de l’aliénation (2015)
http://www.laboriacuboniks.net/fr


Xénoféminisme  : une politique de l’aliénation (2015)
  Créé par les six membres de Laboria Cuboniks (Amy
Ireland, Diann Bauer, Helen Hester, Katrina Burch, Olivia
Lucca Fraser et Patricia Reed), le manifeste 
Xénoféminisme  : une politique de l’aliénation propose un
féminisme adapté à un monde envahi par les médias
technologiques. À travers sept chapitres («zéro»,
«interrompre», «piéger», «parité», «ajuster», «porter»,
«inonder»), accessibles en ligne et traduits en douze
langues, le xénofeminisme construit un nouveau langage
sexuel et politique «qui s’auto-engendre de manière
progressive», pour exploiter les capacités émancipatrices
offertes par les nouvelles technologies. Dans la lignée de
Donna Haraway et du cyberféminisme apparu dans les
années 1990, XF se se nourrit de nombreuses références
littéraires, artistiques et cybertechnologiques. Le site se
veut une «plateforme d’émancipation et d’organisation
sociale» en constante évolution, revendiquant et
redéfinissant un universel loin des normes dites
«naturelles», ayant l’ambition «de construire le nouveau
langage d’une politique sexuelle» en s’appropriant les
nouvelles technologies. Il s’agit de renverser les politiques
inégalitaires et de mettre au point une stratégie offensive
féministe menant à un changement social de grande
envergure. Le texte s’achève ainsi par la déclaration : «Si la
nature est injuste, changez la nature !».
 Laboria Cuboniks est un collectif transnational et
polymorphe formé en 2014, par six femmes (Amy Ireland,
Diann Bauer, Helen Hester, Katrina Burch, Olivia Lucca Fraser
et Patricia Reed). Le nom du groupe est l’anagramme du 
groupe de mathématiciens «Nicolas Bourbaki». Entre art, 
design, philosophie, techno-féminisme et hacking, elles
œuvrent à formuler un féminisme en adéquation avec 
l’abstraction et la complexité du XXIe siècle. Leur travail a 
été présenté à la HEAD de Genève, à la Haus der Kulturen der
Welt (HKW) de Berlin ou encore à l’Institute of
Contemporary Arts de Londres.

​

​

BAUER Diann (membre du collectif Laboria Cuboniks)


XFNO.5 (version française de XFNO. 4), 2017.
Vidéo couleur, durée  : 5’24’’.
Collection de l’artiste 
Diann Bauer, XFNO.5, 2017 ©Diann Bauer


Œuvre commandée par l’académie de Gerrit Rietveld puis
traduite en français par Caroline Hancock pour l’exposition
Xenogenisis au Treignac Projet.
  «Salutations de Laboria Cuboniks», c’est avec ces 
quelques mots que Diann Bauer, membre du collectif
éponyme, introduit le projet XF et son manifeste fondateur, 
Xénoféminisme  : Une politique de l’aliénation (2015) dans
la vidéo XFNO.5. Associée au texte, une succession d’images
et de cercle colorés déferle sur l’écran noir. Les membres du
collectif sont alors incarnées à travers des images
populaires de femmes fortes ayant marqués l’histoire et la
science-fiction, telles que Grace Jones, Sigourney Weaver ou
encore Carrie Fisher. En nous projetant dans un futur
proche, associé au post-humain, XFNO.5  insiste sur la
criante nécessité d’une révolution féministe. Face à
l’aliénation économique et sociale, face aux «  injustices
perpétrées au nom de l’ordre naturel  »  qui touchent
surtout les femmes et les personnes queer, le collectif
Laboria Cuboniks  prône une autodéfense numérique
radicale  : hacker l’innovation technoscientifique, inonder
le cyberespace pour abolir les inégalités fondées sur le
genre, la classe, la race ou la sexualité.
   Ayant débuté sa formation artistique à l’école d’art Cooper
Union à New York, Diann Bauer poursuit son cursus au
Goldsmiths College de Londres. Artiste et écrivaine, elle est
membre du groupe du collectif Laboria Cuboniks, ainsi que
du groupe AST (Alliance of the Southern Triangle) basé à
Miami, plateforme de recherche sur la globalisation, les
politiques écologiques et culturelles et la fiction
spéculative. Maîtrisant de multiples médiums  (vidéo,
écriture, dessins, peinture, sculpture) son travail tant
individuel que collaboratif, interroge la réalité politique,
financière ou sociale de notre société contemporaine pour
envisager d’autres possibles.

​

​

MAIOLINO  Anna Maria 


In-Out (Antropofagia) (1973)
Film super 8, couleur, sonore, transféré sur DVD, durée : 
8’14’’, 49 Nord 6 Est Frac Lorraine, Metz.
 IAnna Maria Maiolino, In-Out (Antropofagia), 1973, Collection 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz © A. M. Maiolino


  Le film expérimental In-Out (Antropofagia) se compose
d’une série de gros plans sur une bouche, féminine ou
masculine, successivement bâillonnée avec du scotch,
entrouverte, grimaçante, ou encore fumant ou
mâchouillant des fils colorés. À la fois grotesques et
inquiétantes, ces images sont juxtaposées à une bande
sonore, réalisée par Laura Clayton de Souza, composée de
rires, de borborygmes, de sons hypnotiques. Cette tonalité
dérangeante est accentuée par le mutisme des bouches,
comme empêchées de parler ou en lutte pour se faire
entendre.
  Exilée à New-York à partir de 1968, Anna Maria Maiolino
revient au Brésil en 1971, au cœur de la dictature militaire 
(1964-1985). Première œuvre vidéo de l’artiste, In-Out 
(Antropofagia) s’inscrit dans un contexte de résistance à la
répression, à la censure et aux souffrances indicibles vécues
par les individus. Entre absorption et déjection, le sous-titre
de l’oeuvre réfère au mouvement artistique brésilien
anthropophage, qui prône l’ingestion symbolique des
violences coloniales pour en faire une force. Ainsi In-Out 
(Antropofagia)  revendique une pratique artistique de
l’anthropophagie, positive, réparatrice et libératrice.
 Artiste plasticienne italo-brésilienne prolifique et
polymorphe, Anna Maria Maiolino est née en  1942. Exilée au
Vénézuela à partir de 1954, elle entreprend des études
artistiques à l’École nationale des Beaux-Arts de Rio de
Janeiro à partir de 1960. Son œuvre viscérale et critique
évolue du néoconcrétisme brésilien jusqu’au
conceptualisme, usant du dessin, de la sculpture, de la
performance ou encore de la vidéo. Dans les années 1970,
dénonçant la censure, les violences et la répression au
Brésil, son travail performatif développe une contestation
politique et sociale. Subjective et intime, l’œuvre de Maria
Maiolino interroge également les multiples strates de son
identité, en tant que femme et émigrée. 

​

​

 MONKO  Marge


Nora's sisters, 2009,
Film de photos avec son, 7 min. Collection 49 Nord 6 Est - 
Frac Lorraine, Metz.
 Nora’s Sisters, 2009,Film de photos avec son, 7 min. Collection 49 Nord 6 Est - Frac Lorraine, Metz © M. Monko 


Montage cinématographique de photographies
d’archives en noir et blanc des années 1950-1960, qui
documentent le travail des ouvrières de l’usine Krenholm
en Estonie, le film Nora’s Sisters développe une réflexion sur
la place des femmes dans la société communiste.
Propagande lisse du bonheur ouvrier, les images sont
perturbées par la bande sonore  : un dialogue en estonien
entre des travailleuses, extrait de la pièce Ce qui arriva 
quand Nora quitta son mari, ou les soutiens des sociétés 
(1977) de l’auteure féministe autrichienne Elfriede Jelinek.
Dans ce passage, l’héroïne Nora tente de prévenir les
ouvrières de la fermeture imminente de l’usine. Cela donne
lieu à un échange énergique autour de l’exploitation
économique et domestique des femmes et les clichés qui les
infériorisent, pour ouvrir sur des possibilités collectives
d’émancipation. Mettant en résonance plusieurs
temporalités historiques par la juxtaposition du texte et de
l’image, l’artiste confronte les effets délétères de la
désindustrialisation initiée dans les années 1970 (l’époque
de la pièce de théâtre de Jelinek) et les conséquences de la
crise financière de 2008 pour les travailleuses. En effet,
lorsque le film est réalisé, en 2009, l'usine Krenholm,
affaiblie par la concurrence et la délocalisation, est au bord
de la fermeture. En fictionnalisant l’histoire, en spéculant
sur le passé, Monko propose une réflexion sur les inégalités
et les oppressions subies par les femmes au quotidien.
  Marge Monko est une artiste estonienne née en 1976 dont
les médiums de prédilection sont la photographie,
l'installation et les images en mouvement. Elle nourrit un
intérêt particulier pour l’histoire, dont elle comble les
lacunes et les censures par la réappropriation et la
réinvention. Elle associe une approche féministe à
l’exploration de la psychanalyse et de la culture visuelle. 

​

​

WILLIAMS Michael 


Stay Woke (2015).
Vidéo expérimentale, durée  : 8’29, collection de l’artiste
Michael Williams, Stay Woke, 2015 ©M. Williams


La vidéo expérimentale Stay Woke  représente une
mutation. Douloureuse, nécessaire, personnelle, sociétale.
Dans ces visuels surréels, ces monologues, ces
environnements colorés dépeuplés, des hommes de couleur
sont augmentés par des accessoires robotiques. Il se
dénudent émotionnellement tandis qu’ils content leurs
histoires. Certains grondent, d’autres témoignent d’une
voix fatiguée, de l’intensité des couleurs qui les entourent,
de la force qui les habite. Les acteurs portent à même la
peau l’empreinte de l’Afrique et de sa multiplicité de
cultures, en confrontation avec le minimalisme des décors.
À travers cette œuvre poétique, il se réapproprie l’univers de
la science-fiction, pour témoigner des discriminations
subies par les personnes de couleur. Plus qu’un réalisateur,
l’artiste laisse entrevoir son travail de sculpteur, de poète,
de philosophe, démontrant une diversité et une hybridation
de médias de création et d’expression, propres aux artistes
des nouvelles technologies.
Michael Williams est un artiste britannique, reconnu pour
ses courts-métrages. Dès l’obtention de son diplôme en art,
il réalise ses propres films. D’héritage métisse noir, il
informe un environnement non-binaire, à travers des
performances artistiques filmées proposant des
hybridations d’identités et une démultiplication de la
définition de la beauté. Il puise dans son environnement,
dans l’histoire des communautés racisées, pour revisiter
l’art vidéo, de manière personnelle, diversifiée et engagée.

​

​

STEYERL  Hito


November, 2004
Vidéo, couleur, sonore, durée  : 25’, 49 Nord 6 Est - Frac Lorraine, Metz.
 Hito STEYERL, November, 2004, Collection 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz  ©H. Steyerl& Adagp, Paris, 2018.


   En écho à la révolution russe et au film October (1927) deSergueï Eisenstein, November  d’Hito Steyerl est uneréflexion philosophique et politique sur le devenir desicônes politiques à l’ère de la globalisation. À partir desrushs d’un film de kung fu féministe de série B réalisélorsque toutes deux étaient adolescentes, la voix off del’artiste narre l’histoire de son amie Andrea Wolf, résistantekurde assassinée par les forces de sécurité de l’état Turc en1998, devenue un symbole révolutionnaire. Juxtaposantdes archives personnelles, des extraits de films oud’interviews télévisés et des musiques populaires,
November se penche sur l’histoire de Wolf sous l’angle de lamigration et de la réappropriation idéologique des images.
Le film montre le statut ambiguë du réel et de la fiction  : lesdiscours des autorités-turques et allemandes propagentdes récits fantasmés sur la mort de Wolf quand les imagesdu film d’arts martiaux amateur deviennent des documentssur l’itinéraire personnel de l’héroïne. Résolumentféministe,  November retravaille le réel par la fiction et seréapproprie l’histoire pour la reconstruire, en hommage àune figure féminine rebelle et impétueuse. Réalisé àl’occasion de la biennale Manifesta 5 en 2004, Novembertrouve une prolongation dans la vidéo Abstract (2012) danslaquelle Steyerl explore les lieux du décès d’Andrea Wolf.
   Née en 1966 à Munich, Hito Steyerl a effectué ses étudesà la Tokyo Academy of Visual Arts et à la Munich Academy of
Television and Film de Munich. Artiste vidéaste, réalisatriceet théoricienne, elle vit aujourd’hui à Berlin où elleenseigne les arts et nouveaux médias à l’Université desarts. Entre théorie et pratique, son travail artistique sepenche sur les problématiques liées à la globalisation, àl’influence d’internet, à l’immigration, à l’histoire et auféminisme. Elle crée des récits filmiques documentairesparsemés d’indices fictionnels, à l’intersection des genreset des approches.

​

​

SUSMAN Verity 
To Make You Afraid (2013).


Clip vidéo, couleur, bande-son, durée  : 6’32.
To Make You Afraid (2013). Clip vidéo, couleur, bande-son, durée  : 6’32. 
Inspiré de la  fanfiction slash Sustenance (1999) de Tenderware :
http://tenderware.home.gate.net/Sustenance.htm


   Le clip de la chanson To Make You Afraid (2013) de Verity
Susman, réalisé par Jack Barraclough, propose un voyage
interstellaire peuplé de créatures cybernétiques dont les
organes sexuels prennent formes de saxophones. Cet
univers visuel psychédélique est inspiré de la fanfiction
Sustenance de Tenderware, un récit publié sur Internet qui
prolonge et transforme l’histoire et les thèmes de Star
Trek. Véritable réappropriation cyberféministe de la série,
il s’agit d’une fiction slash, un genre qui met en scène une
relation amoureuse entre deux personnages de même
sexe. Sustenance invente ainsi une histoire d’amour entre
Kathryn Janeway, première et unique femme capitaine de
Star Trek, et Seven of Nine, ex-drone Borg, créature mimachine

mi-humaine. Dans le morceau To Make You
Afraid, Verity Susman psalmodie un texte mélancolique
d’une voix robotique. Collage hallucinatoire, le clip tisse
autour de Sustenance, en déconstruisant
l’hypersexualisation des femmes et les schémas
hétérosexuels, pour proposer un imaginaire différent et
libérateur. De la fanfictions slash au clip, ces
réappropriations constituent un outil d'émancipation,
d’exploration et de création pour des fans féministes et
queer, qui dépassent ainsi les normes et les tabous.
 Verity Susman est une chanteuse et compositrice
britannique. Ancienne chanteuse du groupe de rock
expérimental anglais Electrelane, elle travaille en tant
qu’artiste d’improvisation libre. Suite à la Biennale de
Venise en 2011, elle se lance dans une carrière solo, mêlant
musique et humour. À travers une esthétique retro space,
animée par un univers queer, sa pratique est constituée
d’expérimentations vocales. Ses concerts psychédéliques
mêlent musique, projections visuelles, performance et
textes, transformant fréquemment son saxophone en
organe sexuel genderqueer. Si elle s’inspire de Peaches,
Laurie Anderson, Jaap Blonk et The Bohman Brothers,
Pauline Oliveros est sa référence artistique ultime.

​

​

VNS Matrix


Manifeste cyberféministe pour le XXIème siècle (1991)
Affiche du manifeste.


  VNS Matrix, fondé par Virginia Barratt, Julianne Pierce,
Francesca da Rimini et Josephine Starrs en 1991 à
Adélaïde (Australie) est un collectif d'artistes qui se
donne pour objectif de questionner l’inégalité de l’accès
des femmes aux nouvelles technologies et le sexisme
dans les représentations des femmes. Selon elles,
Internet et le cyberespace représentent des espaces de
liberté et d’expérimentation pour toutes les personnes
souffrant de discriminations liées au genre.
   En hommage à Donna Haraway, elles inventent le terme
de «cyberféminisme», qui apparaît pour la première
fois dans leur Manifeste cyberféministe pour le XXIème 
siècle  (1991). Forme hybride, textuelle et visuelle, le
manifeste est diffusé sur internet, à la radio, dans les
espaces publics. Subversif et provocateur, le manifeste
envisage une sexualité cyber créatrice et émancipatrice  :
«Nous sommes la chatte moderne [ ] Nous croyons en …
la jouissance, la folie, la sainteté et la poésie. Nous
sommes le virus du nouveau désordre mondial. [ ] Le …
clitoris est une ligne directe avec la matrice». Actif
jusqu’en 1997, le collectif VNS Matrix est l’auteur de
plusieurs manifestes, dont le Bitch Mutant Manifesto
(1996). De 1997 à 2001, il mute en une alliance
cyberféministe internationale appelée Old Boys Network
et basée à Berlin.

​

​

bottom of page